Historique

La profession d'assistante maternelle tire ses origines
de la fonction nourricière exercée, depuis des siècles, par certaines femmes …
Explications sur le développement de ce mode de garde en France

 

 Emergence et développement d'un statut professionnel
Autrefois appelée nourrice, l'assistante maternelle a ensuite été appelée gardienne d'enfants. Maintenant, l'assistante maternelle assure beaucoup plus que de simples fonctions vitales et de gardiennage.
Ainsi, le développement, la professionnalisation et les particularités de la garde d'enfants ont justifié la définition en 1977, puis en 1992, d'un statut professionnel propre à ce métier, distinguant les différentes formes d'accueil (garde permanente ou non permanente) et les différents types d'employeurs (particuliers, personnes morales de droit privé ou personnes morales de droit public).

Préhistoire d'une profession
C'est à la fin du XVIIIe siècle, alors que le taux de mortalité infantile atteint 75 %, que le législateur se préoccupe pour la première fois du métier de la nourrice, en instaurant un code de ses droits et devoirs. Puis, au XIXe siècle, la loi Roussel instaure une surveillance médico-sociale des nourrices. Enfin, la fin de la 2ème guerre mondiale voit la création des services de Protection Maternelle et Infantile, chargés notamment d'organiser la surveillance et les placements nourriciers. L'ordonnance du 2 novembre 1945, à l'origine de cette création, fait également évoluer la fonction nourricière vers une fonction de garde et de soins, toujours dans un souci de baisse du taux de mortalité infantile.

Jusqu'en 1977, l'emploi d'une nourrice était donc un mode de garde peu ou pas reconnu légalement. Il était mal rémunéré, les nourrices exerçant sans formation préalable. De ce fait, les parents n'avaient aucune certitude sur les qualités et les compétences réelles de la nourrice.
Or, au milieu des années 70, la demande de garde commença à fortement se développer avec la généralisation du travail des femmes, entraînant avec elle la croissance du nombre de nourrices, les autres modes de garde étant souvent à l'état embryonnaire, à l'exception des équipements des grandes villes. Il était donc nécessaire de définir à la fois un statut professionnel ainsi que des normes pour la garde, afin que celle-ci concoure à l'éveil intellectuel et affectif de l'enfant.

Le statut des assistantes maternelles a évolué par deux fois, en 1977 et en 1992.

17 mai 1977 : Un premier statut professionnel
La loi du 17 mai 1977 a bouleversé le secteur de la garde des jeunes enfants en créant un statut professionnel pour les nourrices, notamment en fixant les modalités d'agrément, mais aussi en changeant leur dénomination, instaurant le terme d'assistante maternelle.
L'évolution de ce mode de garde a été accompagnée de nombreux avantages pour les assistantes maternelles :

  1. La loi fixe une base de rémunération, à savoir 2 fois le SMIC horaire pour une garde de 8 heures par jour et une égalité de droits avec l'ensemble des salariés en termes de congés payés (1/12ème du salaire annuel) et de sécurité sociale ;
  2. La loi instaure le droit à des indemnités en cas d'absence de l'enfant, celles-ci s'élevant à la moitié du SMIC horaire par jour, payé par les parents.

Dans le même temps, certaines contraintes se sont également imposées aux assistantes maternelles :

  1. La loi définit une fonction "d'assistance aux parents dans leurs tâches éducatives", notamment en précisant les règles d'agrément (examen médical, aptitude reconnue à la garde des enfants, salubrité du logement, remise en cause tous les ans) mais aussi en proposant par la même occasion une formation de 60 heures au cours des 5 premières années (en ce qui concerne les assistantes maternelles agréées pour l'accueil non permanent) ;
  2. La loi impose aux parents employeurs de déclarer l'assistante maternelle employée, et, de ce fait, ces dernières se trouvent soumises à l'impôt sur le revenu.

De même, les parents n'ont pas retiré que des satisfactions de cette loi puisque, si celle-ci a entraîné pour eux une amélioration de la qualité de la garde, elle en a également augmenté le coût, notamment par le nécessaire paiement de charges sociales. Surtout que ces charges connaîtront par la suite une croissance régulière, entraînant par-là même encore une augmentation de son coût.

Ainsi, malgré ces progrès, l'évolution du nombre d'assistantes maternelles agréées sera imperceptible jusqu'en 1992, régressant même au cours des années 80.

1992 : Un deuxième statut professionnel
La loi du 12 juillet 1992, mais aussi les décrets et les arrêtés qui suivirent en septembre, octobre et novembre de la même année, apportent de profondes modifications au statut professionnel des assistantes maternelles institué par la loi du 17 mai 1977 :

  • Les conditions d'obtention de l'agrément sont simplifiées, ce dernier étant désormais instruit par les services départementaux de la Protection Maternelle et Infantile (PMI) ;
  • L'agrément est désormais valable 5 ans et le nombre d'enfants que peut garder l'assistante maternelle est limité à 3 ;
  • L'assistante maternelle peut désormais avoir le soutien d'une assistante sociale et d'une puéricultrice ;
  • Sa rémunération est revalorisée : 2,25 fois le SMIC horaire par enfant et par jour ;
  • La formation devient obligatoire : elle est de 60 heures sur 5 ans (dont 20 au cours des 2 premières années) pour l'accueil non permanent ;
  • Les parents bénéficient d'une réduction fiscale égale à 25 % des sommes dépensées, dans la limite de 15 000 Francs.

 Effets de la législation sur le recours aux assistantes maternelles

Evolution du nombre d'assistantes maternelles agréées (accueil non permanent - France métropolitaine) Si la loi de 1977 a permis, grâce à la mise en œuvre d'un agrément, de centraliser et de connaître l'offre de garde existante, et ce pour la première fois, il faut attendre 1990, et surtout 1992, pour voir apparaître une véritable progression de ce mode de garde en France, grâce à la création de l'AFEAMA, puis la mise en place de sa majoration et de la réduction fiscale.

En effet, avant 1990, les parents avaient toujours plutôt intérêt à ne pas déclarer la garde de leurs enfants par une assistante maternelle, car cela leur évitait de payer les charges sociales liées à leur statut d'employeur. Ainsi, lors du recensement de la population en 1990, si 258 000 femmes déclaraient s'occuper d'enfants, les services de PMI ne dénombraient pour leur part que 135 000 assistantes maternelles agréées sur l'ensemble de la France métropolitaine.

6 juillet 1990 : Instauration de l'AFEAMA
La loi du 6 juillet 1990, qui a instauré l'Aide à la Famille pour l'Emploi d'une Assistante Maternelle Agréée (AFEAMA), a modifié les comportements des parents en rendant plus intéressant ce mode de garde. Elle a surtout incité les parents à déclarer l'emploi d'une assistante maternelle agréée, puisque dorénavant le coût lié à cet emploi devenait moindre, les charges étant payées par la CAF ou la MSA. Les parents qui employaient déjà une assistante maternelle "au noir" ont pu ainsi la déclarer, et, sans coût plus élevé pour eux, ils revenaient dans la légalité.

Mais en fait, jusqu'en 1992 et la mise en place de sa réforme ainsi que celle du statut des assistantes maternelles, l'AFEAMA mise en œuvre n'était pas forcément beaucoup plus avantageuse que l'ancienne PSAM (Prestation Spécifique Assistante Maternelle). Ce mode de garde restait en effet globalement assez coûteux malgré l'aide financière accordée, et donc souvent peu intéressant financièrement pour les parents.
Ainsi, jusqu'en 1992, seule une partie des parents potentiellement concernés utilisèrent cette aide et, sans doute, peu de nouveaux parents adoptèrent ce mode de garde. Ils ne furent pas aussi nombreux que les pouvoirs publics pouvaient s'y attendre et le nombre d'assistantes maternelles agréées semblait être suffisant sur le marché. Les parents désirant bénéficier de l'AFEAMA pouvaient donc, sans difficulté, engager des assistantes maternelles agréées pour faire garder leur enfant. De ce fait, les assistantes maternelles non agréées n'avaient pas non plus de raison de demander l'agrément, la demande n'étant pas très importante.
De plus, il faut bien avouer que l'AFEAMA n'a pas, lors de sa création, apporté aux assistantes maternelles non agréées, de réelles motivations à obtenir cet agrément, puisque ses avantages profitaient surtout aux parents.

Mais, à partir de 1992, on a assisté à une progression spectaculaire du nombre d'assistantes maternelles agréées, puisqu'en l'espace de 4 ans, celui-ci a presque doublé. Les 2 événements qui expliquent et justifient cette forte croissance du nombre d'assistantes maternelles agréées sont les réformes de 1992, dans lesquelles 2 avantages principaux vont en effet être accordés aux parents.

Janvier 1992 : Instauration de la majoration AFEAMA et de la réduction fiscale
En janvier 1992 (en fait dans la loi du 31 décembre 1991), le législateur instaure la majoration AFEAMA. Il s'agit d'une aide mensuelle supplémentaire de 820 Francs (elle a augmenté depuis) accordée aux parents pour chaque enfant gardé s'il a moins de 3 ans (la moitié si l'enfant est âgé entre 3 et 6 ans).
L'un des objectifs de cette aide était de rendre plus solvable ce mode de garde par rapport aux modes plus traditionnels que sont les crèches (qui étaient alors en saturation et dont le coût d'extension est très élevé) puisque, à l'évidence, les effets de l'AFEAMA sur le coût de ce mode de garde restaient insuffisants jusqu'alors, le nombre de familles bénéficiaires n'ayant pas réellement décollé.
L'avantage de cette réforme est que cette majoration produit un gain direct pour les parents, qui reçoivent en main propre cette somme versée par la CAF, alors que l'AFEAMA produisait seulement une diminution du coût. Or, dans le comportement des ménages, et donc dans le choix de tel ou tel mode de garde pour l'enfant, cette perception différentielle joue un rôle primordial, à qualité égale.

Dans le même temps, le législateur signifie aux parents (toujours dans la loi du 30 décembre 1991) qu'ils peuvent dorénavant bénéficier d'une réduction fiscale égale à 25 % des dépenses dans la limite de 15 000 Francs (cette réduction étant valable pour tout frais de garde de jeunes enfants de moins de 7 ans). Même si les réductions accordées aux parents restent inférieures à celles possibles dans le cadre de l'Allocation de Garde d'Enfant à Domicile (AGED), elles seront dorénavant identiques à celles qui sont autorisées dans le cadre de la garde par une crèche et confirment le regain de solvabilité de la garde par une assistante maternelle.

Ces deux avantages accordés aux parents vont donc contribuer à favoriser le recours à la garde par une assistante maternelle agréée, phénomène que la difficulté à obtenir une place dans une crèche vient renforcer.
En effet, les parents, qui avaient préféré ne pas bénéficier de l'AFEAMA (recourant au travail non déclaré) lors de sa création, ont observé ces nouveaux avantages avec attention, et ont souvent choisi de recourir aux services d'une assistante maternelle agréée, puisque ce choix devenait beaucoup plus solvable pour eux. De même, certains parents n'ayant jusqu'alors pas recours à ce mode de garde, ont également pu le choisir, face aux avantages proposés. Ceci explique que beaucoup de parents ont ainsi fait la demande de l'AFEAMA, et justifie que le nombre de familles bénéficiaires ait continué à croître régulièrement, passant de 159 000, fin 1992 à 468 000, fin 1998.  

 Au bilan : Une profession et un mode de garde prisés 
Concernant le nombre d'assistantes maternelles, force est de constater que l'on a observé durant cette période une double pression :

  • D'une part, la forte demande des parents a ainsi incité de nombreuses assistantes maternelles à demander un agrément afin de pouvoir répondre à la sollicitation des parents employeurs ;
  • D'autre part, il y a eu une pression des parents employant "au noir" une assistante maternelle, ceux-ci l'encourageant à demander un agrément afin de pouvoir bénéficier de l'AFEAMA, qui devenait avantageuse pour eux.

Cette double pression a ainsi entraîné une forte demande d'agréments en quelques mois seulement et explique, pour partie, la brusque progression du nombre d'assistantes maternelles agréées.

En second lieu, les personnes souhaitant effectuer de la garde à domicile sont également incitées à obtenir leur agrément, en plus des raisons évoquées précédemment. En effet, les textes de 1992 accordent des avantages indéniables aux assistantes maternelles lorsqu'elles sont agréées. En effet, celles-ci ont obtenu une revalorisation de leur salaire, et ceci a entraîné pour elles un avantage certain à devenir agréées, si elles ne l'étaient pas auparavant, et de se déclarer si elles étaient déjà agréées mais non déclarées.
De plus, pour beaucoup d'entre elles, l'obtention de l'agrément pendant cinq ans, et non plus pour un an, est un avantage intéressant, puisque cela limite les "tracasseries" administratives et leur permet de garantir aux parents souhaitant les employer qu'ils pourront bénéficier de l'AFEAMA jusqu'au 6 ans de leur enfant (même si la majoration n'est versée pleinement que durant les 3 premières années).

Ces différents éléments expliquent donc le nombre toujours croissant de bénéficiaires de l'AFEAMA, et surtout la forte progression du nombre d'assistantes maternelles agréées.

 Post scriptum 1 : La modulation de la majoration AFEAMA instaurée en 2001 
C'est lors de la Conférence annuelle de la Famille, le 15 juin 2000, que le gouvernement a annoncé diverses mesures en faveur de la garde des jeunes enfants.

Parmi celles-ci, la modulation de la majoration AFEAMA, officialisée dans la loi du 23 décembre 2000 et le décret du 4 janvier 2001, a pour objectif de favoriser le recours aux assistantes maternelles pour les familles aux revenus modestes sans porter atteinte à l'aide déjà consentie aux familles plus favorisées. Ce sont donc 30 000 nouvelles familles (calculs du gouvernement de l'époque) qui ont du bénéficier de cet effort public... et ainsi confirmer la prédilection des parents pour ce mode de garde en France.

 Post scriptum 2 : L'instauration de la PAJE en 2004 
Une nouvelle fois, c'est encore lors de la Conférence de la Famille (cette fois-ci le 29 avril 2003) que le gouvernement a annoncé de nouvelles dispositions, toujours en faveur de la garde des jeunes enfants.

Parmi celles-ci, l'actuel gouvernement a remplacé, pour les enfants nés à partir du 1er janvier 2004, toutes les aides existantes (APJE, AFEAMA, AGED, APE) par un nouveau dispositif en faveur des familles, la PAJE (Prestation d'Accueil des Jeunes Enfants). Le principal objectif affiché consiste à permettre à tous de choisir plus librement le mode d'accueil du jeune enfant...

A cette occasion, J-P. Raffarin a aussi annoncé une autre réforme.
Il s'agit cette fois de rénover le statut des assistantes maternelles, notamment afin de rendre leur profession plus attractive.

 Post scriptum 3 : L'extension de la convention collective en janvier 2005  
Signée le 1er juillet 2004, la convention collective des assistants maternelles du particulier employeur a du attendre les derniers jours de décembre pour voir son extension arrêtée.  

Il n'est pas contestable que cette convention, applicable depuis le 1er janvier 2005, apporte un certain nombre de réponses aux revendications des assistantes maternelles, tant du point de vue de leur professionnalisation que de leurs conditions de travail.

En affirmant par exemple le caractère normal de la mensualisation de leur rémunération, la reconnaissance des frais auxquelles elles doivent faire face en accueillant des enfants, la nécessité d'un contrat de travail écrit et l'obtention d'un bulletin de salaire mensuel à date fixe, mais aussi en instaurant un régime de prévoyance pour prévenir les pertes de salaire en cas de maladie ou d'accidents, le texte de cette convention et de ses annexes leur permet de diminuer nettement la précarité de leur situation.

En instituant des structures paritaires de négociation pour prévenir les litiges et des objectifs de formation et de qualification, nul doute que le métier va aussi continuer d'évoluer dans les prochaines années... si le projet de loi censé réformer le statut des assistantes maternelles et toujours en panne depuis juin 2004 à l'assemblée nationale ne vient pas casser cette belle dynamique !?

Affaire toujours à suivre...

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